BLACK PHONE 2 : La suite qui réveille les fantômes du passé
Le premier Black Phone résonne encore dans les mémoires. Signé Scott Derrickson, ce bijou d’horreur s’est rapidement imposé comme l’un des films les plus marquants des années 2020. Et voilà que Ethan Hawke renfile le masque du terrifiant Grabber pour un second chapitre qui affole déjà la twittosphère. Nous avons eu la chance de découvrir ce nouveau volet en avant-première – il est temps de décrypter cette masterclass du frisson.

Ce second opus se déroule quelques années après les événements du premier film. Finney, désormais âgé de 17 ans, peine à retrouver une existence normale depuis son enlèvement. À l’inverse, Gwen, sa sœur de 15 ans, refuse de se laisser freiner par le passé. Mais lorsque le sinistre téléphone se remet à sonner, cette fois dans les rêves de l’adolescente, les cauchemars prennent une tournure bien réelle : elle y voit trois garçons traqués dans un camp de montagne isolé, Alpine Lake. Résolue à comprendre ces visions et à y mettre un terme, Gwen convainc son frère de partir sur place, malgré le blizzard qui s’abat sur la région. Là-bas, ils vont découvrir une vérité terrifiante : le lien entre le Grabber et leur propre famille est bien plus profond qu’ils ne l’imaginaient. Pour survivre, les deux adolescents devront affronter un tueur qu’aucune mort ne semble pouvoir arrêter.
Faire revenir The Grabber d’outre-tombe pour hanter la famille de Finney relevait d’un pari audacieux, presque dangereux. Le risque de redondance ou de surenchère planait clairement au-dessus du scénario. Et pourtant, le film relève le défi avec brio. Plus viscéral, plus angoissant, ce second volet assume pleinement son virage horrifique : le sang coule davantage, la tension est constante, et chaque apparition du Grabber glace le sang. Scott Derrickson réussit à étendre l’univers sans trahir l’essence du premier film, en mêlant habilement drame familial et horreur surnaturelle. Les scènes d’action sont d’une intensité folle, filmées avec une nervosité presque palpable, et portées par une mise en scène qui flirte parfois avec le cauchemar éveillé. Résultat : une suite qui ne se contente pas de ressasser le passé, mais qui repousse les limites du mythe, pour le plus grand plaisir des amateurs de frissons.

Madeleine McGraw livre une performance magistrale dans la peau de Gwen, la sœur de Finney. Véritable moteur de ce deuxième opus, c’est elle qui mène la danse et donne le ton. Ses rêves, à la frontière du réel et du surnaturel, deviennent le fil conducteur du récit et permettent le retour du terrible Grabber. À la fois lumineuse et tourmentée, Gwen incarne cette dualité rare entre fragilité et puissance. Qu’il s’agisse d’un cri viscéral, d’une prière étouffée ou d’un regard d’acier face à son bourreau, toute l’émotion du film émane d’elle. Face à elle, Ethan Hawke reste hypnotisant. Son Grabber, toujours aussi terrifiant, hante les cauchemars de Gwen avec une présence quasi mythologique. Chaque apparition glace le sang et rappelle pourquoi le personnage est déjà une icône du cinéma d’horreur moderne. En revanche, Mason Thames, plus effacé cette fois, peine à exister face à la force émotionnelle de sa partenaire. Le scénario ne lui laisse aucune marge de manœuvre au-delà d’une analyse superficielle du deuil résiduel.
Alpine Lake offre un cadre visuel à couper le souffle. Porté par une bande-son anxiogène signée Atticus Derrickson, le film nous plonge dans un décor de montagnes isolées, balayées par le blizzard, où un lac gelé trône au centre comme un miroir du désespoir. Sous l’œil précis du directeur de la photographie Pär M. Ekberg, chaque plan devient une toile glaciale d’une beauté presque hypnotique. Black Phone 2 surpasse sans conteste le premier opus sur le plan visuel, avec une maîtrise esthétique impressionnante et une atmosphère plus oppressante que jamais. Cependant, cette virtuosité formelle ne parvient pas toujours à masquer les faiblesses du scénario. Les personnages secondaires d’Alpine Lake manquent cruellement de consistance : leur présence semble plus fonctionnelle que narrative, et il est difficile de s’y attacher. Par moments, le film donne l’impression de vouloir justifier son existence plutôt que de raconter une nouvelle histoire nécessaire. Un léger faux pas dans une œuvre qui, par ailleurs, frôle souvent l’excellence technique.

Au final, Black Phone 2 réussit là où beaucoup de suites échouent : il prolonge intelligemment l’univers du premier film tout en osant une approche plus viscérale et spirituelle. Scott Derrickson livre une œuvre qui explore la culpabilité, la mémoire et la résilience, sans jamais trahir la noirceur originelle. Si certains personnages secondaires peinent à trouver leur place, l’intensité émotionnelle de Gwen et la présence spectrale du Grabber suffisent à maintenir le souffle jusqu’au bout. Visuellement sublime, habité par une tension constante et une mise en scène aussi élégante qu’implacable, le film confirme que Derrickson maîtrise l’art du frisson intime, celui qui glace le sang autant qu’il serre le cœur. Une suite imparfaite, mais terriblement habitée.
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