Zorro Revient : Entre Humour, Identité et Démythification du Héro
La nouvelle série Zorro avec Jean Dujardin marque le premier grand projet de Paramount Plus. Disponible en France dès ce vendredi, elle sera bientôt accessible dans plusieurs autres pays, dont l’Italie, la Suisse, l’Allemagne, ainsi que dans certaines régions d’Amérique latine et au Royaume-Uni. Nous avons eu l’opportunité de découvrir la série en avant-première et d’assister à la conférence de presse dédiée. Voici notre avis sur ce projet très attendu.
Réalisée par Émilie Noblet et Jean-Baptiste Saurel, avec un scénario signé Benjamin Charbit et Noé Debré, la nouvelle série Zorro se déroule 20 ans après les événements de la série originale. Don Diego de la Vega a délaissé son célèbre alter ego depuis deux décennies et est désormais maire de Los Angeles suite au décès de son père. Cependant, il peine à maintenir l’ordre dans la ville, et sa relation avec sa femme, Gabrielle, est au bord de la rupture. Déplus, Il n’a pas d’autres choix que de lutter contre la main mise sur la ville par Don Emmanuel. Face à ces défis, le moment semble propice pour que Zorro ressorte son masque et son épée, marquant un retour certes chaotique, mais nécessaire, du légendaire justicier !
L’approche de Zorro proposée par Benjamin Charbit et Noé Debré se distingue clairement des précédentes adaptations. Ici, Zorro n’est pas simplement un héros masqué combattant l’injustice, mais plutôt le produit d’une psyché refoulée. Don Diego de la Vega, constamment critiqué par son père pour sa douceur et ses manières, aurait progressivement renié son amour pour la littérature, la musique et sa quête de solutions pacifiques, pour finalement créer un double plus conforme aux attentes paternelles. Dans cette version, Zorro devient presque secondaire, avec Don Diego occupant le rôle central. En effet, Benjamin Charbit a même révélé que le titre initial du projet aurait pu être Diego, puisque la série met en avant l’homme derrière le masque et ses conflits intérieurs.
Avec une touche d’humour, voire d’absurde, Zorro se concentre sur les problèmes d’identité de Diego de la Vega. Sa femme, Gabriella, tombe amoureuse de Zorro, cet homme fougueux et intrépide, bien plus séduisant que son mari doux et effacé. Diego, conscient d’être devenu de trop, laisse alors la place à son alter ego. Mais très vite, il se rend compte que Zorro, aussi héroïque soit-il, n’est pas fait pour une vie de famille. Finalement, il choisit de redevenir Diego. Bien que cette mécanique, basée sur le dilemme du double, soit souvent vue dans le cinéma, elle fonctionne parfaitement dans le contexte de Zorro. Le spectateur est tiraillé : qui doit-il préférer, Zorro ou Diego ?
Les personnages qui gravitent autour de Diego sont tout aussi absurdes que lui. Le Sergent Ficarra, incarné par Grégory Gadebois, remplace le Sergent Garcia pour des raisons de cohérence temporelle. Contrairement à son prédécesseur, souvent perçu comme l’idiot de la commanderie, Ficarra est ici dépeint comme un intellectuel. Il a fait la paix avec Zorro, allant même jusqu’à le considérer comme un ami, tout en poursuivant inlassablement sa mission de l’arrêter. De l’autre côté, nous avons Don Emmanuel (interprété Salvatore Ficarra), un « gentil méchant« , un homme petit de stature, mais qui tire grandement profit d’un système qui lui est favorable. Enfin, notre coup de cœur est Bernardo, l’assistant muet de Zorro, interprété magistralement par Salvatore Ficarra. Bien que son script soit minimaliste, Salvatore réussit à rendre ce personnage expressif et attachant, devenant rapidement le chouchou de la série.
Gabriella, le personnage féminin central de la série, incarne une femme forte, indépendante, et infidèle. Son rôle met en lumière une dynamique singulière : l’infidélité de Diego envers lui-même, comme l’explique Audrey Dana, l’actrice qui prête ses traits à Gabriella. Elle justifie ainsi le coup de foudre de son personnage pour Zorro : « Un coup de foudre, c’est lorsqu’on a l’impression de reconnaître quelqu’un. Face à Zorro, [en réalité] elle voit son mari, elle sent son mari, et elle se dit ‘celui-là, je le connais’. C’est tout ce qui fait un coup de foudre. » Gabriella se trouve effectivement face à Diego, mais ne le reconnaît pas, car l’homme qu’elle a en face d’elle, courageux et fort, contraste profondément avec son mari habituellement plus réservé et timide.
Dans la série, Gabriella joue un rôle clé dans la démythification et l’humanisation du héros. Zorro n’est plus le symbole du justicier infaillible que l’on connaissait, mais plutôt un homme ordinaire, avec ses faiblesses et ses doutes. Cette relecture du personnage montre que tout le monde, aujourd’hui, peut revêtir un masque et une cape et se prétendre être Zorro. L’idée que l’identité de Zorro n’est qu’une façade ouvre une réflexion sur le véritable rôle de Diego et sur la façon dont chacun peut, en fin de compte, incarner le héros selon les circonstances.
Nous avons passé un agréable moment devant Zorro. Bien que l’absurdité de la série nous ait d’abord surpris, surtout en s’attendant à une adaptation plus sérieuse, nous avons rapidement été captivés par l’évolution de l’histoire. Chaque épisode nous poussait à regarder le suivant, tant le récit nous tenait en haleine. Cependant, nous aurions aimé davantage de profondeur dans le développement des personnages, car l’humour omniprésent tend parfois à éclipser leurs motivations et leur contexte. Malgré ce petit bémol, cette version moderne de Zorro est une véritable réussite, et nous la recommandons sans hésiter.
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